Les auditions de la commission de la défense

Commision de la Défense et des forces arméesDans le cadre des auditions menées, sur le Projet de loi de finances pour 2013, par la commission de la défense et des forces armées de l’Assemblée nationale, Philippe FOLLIOT a eu l’occasion d’interpeller différents acteurs militaires de premier plan. Ces auditions lui ont permis de questionner ses interlocuteurs sur des  thématiques  dont dépend la future politique de la défense nationale.

En tant que secrétaire de la commission, il a ainsi auditionné le Ministre de la Défense Jean-Yves Le DRIAN, sur le budget de la défense 2013 et plus précisément sur les cessions immobilières, mais aussi le Ministre délégué aux Anciens combattants, Kader ARIF, sur la transmission du devoir de mémoire.

Le député du Tarn a également interrogé le Chef d’Etat-Major des Armées, l’Amiral Edouard GUILLAUD, sur le programme Balard. De même, Philippe FOLLIOT a questionné le délégué général pour l’armement, Monsieur Laurent COLLET-BILLON, sur les problèmes d’aéromobilité. Il a en outre eu l’occasion d’évoquer les missions de souveraineté en Outre-Mer et dans le Zone économique exclusive (ZEE) lors de l’audition du Chef d’Etat-Major de la Marine, l’Amiral Bernard ROGEL. Ce fut enfin l’occasion pour lui d’évoquer la livraison de l’A400M et de la formation des pilotes avec le Chef d’Etat-Major de l’Armée de l’Air, le général Denis MERCIER.

Vous pouvez lire ci-dessous la transcriptions des auditions mentionnées ci-dessus :

Audition de Jean-Yves Le DRIAN, Ministre de la Défense, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013 (Mardi 2 octobre 2012)

M. Philippe FOLLIOT. Je tiens à noter qu’une partie des ressources de l’année prochaine est fondée sur des recettes exceptionnelles, qui sont de deux ordres : des cessions de fréquences et des cessions immobilières. L’Assemblée nationale a débattu la semaine dernière d’un projet de loi relatif à la mobilisation du foncier public en faveur du logement, qui prévoit des cessions gratuites. Or Mme Cécile Duflot, ministre de l’égalité des territoires et du logement, ne m’a pas répondu lorsque je lui ai demandé si le foncier de la défense était concerné par de telles cessions. Si tel était le cas, cela obérerait vos recettes exceptionnelles – vous avez évoqué un arbitrage ministériel de l’ordre de 600 millions d’euros, alors que le projet de budget prévoit quelque 1,270 milliard d’euros. Le ministère de la défense ne risque-t-il pas de se retrouver en position délicate face à la pression des élus locaux désireux d’obtenir gratuitement du foncier pour réaliser du logement social ? Le financement de Balard ne repose-t-il pas lui-même sur la vente d’emprises du ministère de la défense sur Paris ?

M. Jean-Yves Le DRIAN, Ministre de la Défense. Monsieur Folliot, la prise de risque est réelle. C’est vrai que le budget de la défense, dans le cadre de l’amicale et traditionnelle rivalité avec Bercy, doit réaliser la quadrature du cercle. L’Europe est un des moyens de la réaliser. Faire des choix responsables est un autre moyen, sans oublier la gestion tactique à l’égard des acteurs, y compris au sein de l’État. Je préférerais évidemment ne pas avoir besoin de recettes exceptionnelles pour boucler mon budget. Cette situation demande la plus grande vigilance. Après arbitrage du Premier ministre, les 673 millions d’euros affectés aux recettes immobilières sont intégrés au budget de la défense pour 2013. S’agissant des cessions de fréquences, le montant s’élève à 1,067 milliard. J’ignore en revanche ce qu’il en sera du budget de 2014. Je tiens à rappeler que le budget de 2012 n’a été équilibré que grâce à des recettes exceptionnelles. Quant aux cessions gratuites de terrains, je ne saurais prendre position de manière définitive, car il y a des situations et des usages potentiels, notamment à Paris, très différents. Balard n’est pas fini. Je suis à la fois prudent et exigeant.

Audition de Kader ARIF, Ministre délégué chargé des Anciens combattants, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013 (Mercredi 3 octobre 2012)

M. Philippe FOLLIOT. Monsieur le ministre, dans le contexte budgétaire actuel, vous avez globalement su préserver votre budget. Mais je ne suis pas sûr que le nombre important de commémorations actuelles, qui attirent peu de personnes, généralement âgées, nous permettra de transmettre la mémoire. Un effort doit être fait à l’égard des jeunes en faveur du 11 novembre comme journée du souvenir. 2012 est aussi le 70e anniversaire de la bataille de Bir Hakeim, qui est passée quasiment inaperçu. À côté des grands monuments ou commémorations, on a tendance à oublier les plus petits, pour lesquels œuvrent de nombreuses associations partout en France comme à l’étranger : avez-vous des crédits pour les y aider ?

M. Kader ARIF, Ministre délégué chargé des Anciens combattants. Monsieur Folliot, je serai présent en octobre à El-Alamein et je représenterai le gouvernement français auprès des ministres de la défense ou de mes homologues étrangers d’ici quelques jours. Quant au soutien aux initiatives locales rencontrant des difficultés financières pour conserver les lieux mémoriels en bon état, il constitue pour moi une priorité.

Audition de l’Amiral Edouad GUILLAUD, Chef d’Etat-Major des Armées, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013 (Mercredi 10 octobre 2012)

M. Philippe FOLLIOT. Qu’en est-il du programme Balard? Les nouvelles conditions de cessions immobilières sont-elles de nature à le remettre en cause ?

Amiral Édouard GUILLAUD, Chef d’Etat-Major des Armées. Pour le programme Balard, je dispose de la même source d’information que vous : les blogs. La location de la corne ouest rentre dans l’équation financière générale. Une mission d’enquête conjointe de l’inspection générale des finances et du contrôle général des armées est en cours. Je ne peux préjuger de son résultat. Quoi qu’il en soit, j’ai besoin de ce programme, même s’il doit être implanté ailleurs.

Audition de Laurent COLLET-BILLIN, Délégué général pour l’Armement, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013 (Mercredi 10 octobre 2012)

M. Philippe FOLLIOT. Nos forces ont aujourd’hui à faire face à des problèmes d’aéromobilité. Où en est l’A400M ? Sa livraison pourra-t-elle être accélérée, ne serait-ce que pour éviter de devoir prolonger la vie de nos vieux Transall ?

M. Laurent COLLET-BILLON, Délégué général pour l’Armement. Monsieur FOLLIOT, je suis partisan d’augmenter la série d’A400M si on m’en donne les moyens budgétaires, ce qui n’est pas le cas. Il conviendra de faire un arbitrage entre les capacités de transport logistique et d’intervention sur le terrain. Il est important de livrer le premier appareil en 2013 à l’armée de l’air française pour qu’elle puisse commencer à former des équipages et à planifier des pré-capacités opérationnelles. Le premier A400M devrait être opérationnel en juin 2013.

Audition de l’Amiral Bernard ROGEL, Chef d’Etat-Major de la Marine, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013 (Mercredi 10 octobre 2012)

M. Philippe FOLLIOT. Ce matin, le chef d’état-major des armées (CEMA) nous a dit que certains bâtiments avaient moins d’1 millimètre d’épaisseur de coque métallique et qu’ils tenaient essentiellement par les couches de peinture successives – ce qui est révélateur des difficultés Nous sommes, pour l’accomplissement des missions de souveraineté outre-mer et dans la ZEE, confrontés à une impasse capacitaire grave : ne peut-on redéployer des moyens de métropole pour au moins renforcer un point d’appui dans l’océan Indien et dans le Pacifique, ce qui nous donnerait en plus une capacité de projection dans certaines régions sensibles du globe ?

Amiral Bernard ROGEL, Chef d’Etat-Major de la Marine. Monsieur Folliot, tous les P 400 et les Batral sont aujourd’hui en cours de retrait. On a donc commandé trois B2M en remplacement – sachant que les Batral, avaient des capacités amphibies, utiles par exemple pour le débarquement de fret humanitaire comme ils l’ont fait à Haïti. Si le contrat est passé l’année prochaine, comme je l’espère, nous pourrons avoir ces navires de soutien en 2015. Pour les missions de souveraineté outre-mer, nous avons prévu, outre les B2M, les deux patrouilleurs de Guyane en raison de l’arrivée des plates-formes pétrolières et de la pêche illégale dans la région.

M. Philippe FOLLIOT. Pour sécuriser les tirs aussi…

Amiral Bernard ROGEL. Oui, mais également pour l’action de l’État en mer. On espère combler partiellement le trou capacitaire avec les B2M et les patrouilleurs en Guyane, mais il faudra ensuite avoir les Batsimar. Nous avons déjà redéployé deux patrouilleurs : Le Malin – bateau saisi pour pêche illégale aux Kerguelen, que nous avons racheté – vers la Réunion – et l’Arago vers la Polynésie. Mais les Batsimar vont aussi remplacer certains moyens métropolitains, tels que les bâtiments de surveillance des pêches : le redéploiement a donc ses limites. Et si on met des bateaux plus gros sur les points d’appui que vous évoquez, on risque d’augmenter substantiellement le MCO.

M. Philippe FOLLIOT. Pourrait-on mettre des FREMM outre-mer ?

Amiral Bernard ROGEL. C’est le même problème, mais on pourra y réfléchir lorsque nous aurons les 11 à flot !

Audition du Général Denis MERCIER, Chef d’Etat-Major de l’Armée de l’Air, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013 (Mercredi 16 octobre 2012)

M. Philippe FOLLIOT. L’A400M est très attendu, notamment dans les unités parachutistes. Les trois premières livraisons doivent avoir lieu en 2013, et les quatre suivantes en 2014. Qu’est-ce qui a été prévu en matière de formation de leurs pilotes ? Est-ce qu’il est envisageable d’accélérer le rythme de livraison, par exemple si de bonnes nouvelles concernant l’exportation du Rafale dégageaient des marges de manœuvre ?

Général Denis MERCIER, Chef d’Etat-Major de l’Armée de l’Air. L’A400M constitue ce que l’on peut appeler une « capacité socle », c’est-à-dire qu’il sera commun à toutes les armées. Les retards dans sa livraison nous coûtent cher, ne serait-ce qu’en maintien des compétences. Pour autant, il est difficile d’accélérer le rythme de livraison de cet équipement, du fait du caractère multilatéral du programme : nos partenaires connaissent les mêmes problèmes que nous. L’A400M connaîtra plusieurs standards. Le premier sera adapté aux opérations de parachutistes et au transport logistique. Nous l’accepterons si la soute est totalement opérationnelle en mai prochain, ce en quoi j’ai confiance. Les standards suivants évolueront vers des fonctions plus tactiques. Pour conserver nos savoir-faire, et aussi permettre à l’armée de terre de continuer à s’entraîner, nous avons dû commander huit avions de transport tactique léger CASA. Le rythme de livraison de l’A400M tel qu’il est prévu est assez intensif jusqu’en 2025, et nous en aurons reçu déjà une trentaine vers 2017-2018, lorsque la flotte à laquelle il doit succéder sera retirée du service. Quant au Rafale, je crois que si nous ne l’avons pas encore exporté, c’est parce qu’il est en avance sur sa génération – quoi que sa conception ait commencé dans les années 1970. Le seul véritable avion de sa catégorie est l’avion de combat JSF (Joint Strike Fighter), qui ne dépasse le Rafale qu’en furtivité. Si nous avions des marges de manœuvre, je préférerais les employer à moderniser nos Mirage 2000 et à acquérir des capacités socles.

 

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