Philippe FOLLIOT intervient dans le débat relatif à l’emploi des forces armées

 

Philippe FOLLIOT a récemment représenté le groupe UDI lors du débat sur le rapport au Parlement relatif aux conditions d’emploi des forces armées sur le territoire national pour protéger la population. Celui-ci, prévu par l’article 7 de la loi de programmation militaire actualisée pour les années 2015 à 2019, permet aux parlementaires d’être tenus informés sur la mobilisation des moyens de défense français, qui a atteint un niveau très élevé tant pour les opérations Vigipirate que Sentinelle.

Dans son intervention, le Secrétaire de la Commission de la Défense nationale et des Forces Armées a notamment souligné la nécessité pour notre pays de se doter d’une véritable garde nationale. Le plus rapidement possible, celle-ci devrait relayer les hommes déjà engagés afin d’alléger les tensions pesant sur nos armées.

Retrouvez l’intervention de M. FOLLIOT ci-dessous:

Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission de la défense, mes chers collègues, voilà quatre mois, la France était touchée en plein cœur par les attentats les plus meurtriers de notre histoire.

Le Groupe de l’Union des démocrates et indépendants tient une nouvelle fois à rendre hommage aux 130 victimes, aux blessés, à leurs proches et, plus largement, à toutes les victimes de tous les attentats. Nous tenons également à exprimer toute notre gratitude aux forces de l’ordre et de sécurité civile, pour leur courage et leur professionnalisme sans faille.

Ces événements tragiques nous ont rappelé de la pire des manières que nous devons plus que jamais faire face à une menace durable et qu’il est vital d’adapter nos moyens de défense et de sécurité.

En effet, le continuum sécurité-défense est de plus en plus prégnant et mes différents déplacements en OPEX m’ont permis de mieux cerner que c’est en Afghanistan, au Mali, au Niger, au Tchad, au Liban ou encore en République Centrafricaine que se joue aussi et surtout notre sécurité.

C’est pour cela que les députés du Groupe UDI ont soutenu sans réserve le Président de la République et le Gouvernement chaque fois que l’intérêt de la France était en jeu, dans un esprit de responsabilité et d’union nationale.

Cela fut le cas pour le Mali et la Centrafrique, cela fut également le cas pour le lancement de l’opération Chammal en Irak ainsi que pour les frappes aériennes en Syrie. Ce sera le cas pour le traitement que nous appelons de nos vœux de la crise libyenne.

L’engagement de la France dans ces pays est un impératif pour combattre le terrorisme et la barbarie qui menacent nos valeurs et la sécurité de nos concitoyens.

En effet, plus il y aura de zones « grises » de non-droit, bases actives du terrorisme et de la criminalité internationale, plus le risque sera élevé en France et en Europe. Nous devons donc combattre notre ennemi tant à l’étranger que sur notre propre sol. L’opération Sentinelle, à ce titre, est un élément important de la lutte contre le terrorisme.

Le groupe UDI prend acte de la transmission du rapport sur l’emploi des forces sur le territoire national remis au Parlement conformément à l’article 7 de la loi de programmation militaire actualisée pour les années 2015 à 2019, à la suite d’une demande formulée par nos collègues sénateurs et que nous avions soutenue.

Lors de l’actualisation de cette même LPM, nous avions demandé que les opérations extérieures et intérieures en cours fassent l’objet d’un débat en séance plénière au Parlement deux fois par an. Nous espérons que cette proposition sera entendue par le Gouvernement, car il est à nos yeux essentiel que la représentation nationale tout entière, ainsi que l’ensemble de nos concitoyens, soient régulièrement informés sur les tenants et aboutissants des actions menées par la France sur les théâtres d’opérations extérieures, mais également sur notre territoire national.

Mes chers collègues, il est logique que les forces armées puissent intervenir ponctuellement sur le territoire national afin de rassurer et de protéger la population face à une menace terroriste d’ampleur telle que nous la connaissons actuellement.

Toutefois, dans un cadre juridique de légitime défense contraint, nos militaires assurent actuellement un rôle qui ne relève pas de leur mission première – la défense –, leurs missions se substituant de fait à celles de la police et de la gendarmerie, voire d’entreprises privées de services de sécurité et de défense.

C’est pourquoi l’installation dans la durée d’un dispositif tel que l’opération Sentinelle nous interpelle.

Comme le souligne le rapport du Gouvernement, « extraordinaire » dans son principe, cet emploi sur le territoire national doit demeurer « extraordinaire » dans le temps.

En effet, nos armées sont au maximum de leurs possibilités : 34 000 hommes sont actuellement engagés, dont près de 11 000 en France métropolitaine, mais également dans 25 opérations extérieures. C’est un niveau jamais atteint depuis la fin de la guerre d’Algérie.

Dès 2013, le groupe UDI avait fait part de ses inquiétudes et de ses réserves. Nous nous étions en conséquence opposés aux budgets successifs ainsi qu’à la loi de programmation militaire pour les années 2014 à 2019, mettant en garde le Gouvernement sur le manque de moyens, mais également sur les conséquences dramatiques des baisses d’effectifs prévues : 23 500 postes supplémentaires devaient être supprimés, s’ajoutant aux 54 000 postes supprimés dans la précédente LPM.

Si cette trajectoire avait été maintenue, les effectifs de la défense auraient diminué d’un quart en dix ans, entre 2009 et 2019. En 2014, le ministère de la défense, à lui seul, a assumé près de 60 % des suppressions d’emplois d’État. En 2015, il était prévu que ce ratio augmente encore jusqu’à 66 %.

Pour le Groupe UDI, il était inconcevable de demander à la défense de réaliser tant d’efforts – bien plus que les autres ministères et administrations civiles – dans un contexte où la menace n’a jamais été aussi élevée.

Nous avons donc salué la prise de conscience du Gouvernement, si tardive fût-elle, monsieur le ministre, quant à la nécessité de mettre un terme aux suppressions de postes dans le domaine de la défense.

Toutefois, les récents recrutements ne soulageront pas une partie des tensions dans nos armées avant l’été, puisque les nouveaux militaires recrutés devront ensuite être formés.

Le général Pierre de Villiers, chef d’état-major des armées, a d’ailleurs rappelé en début d’année que l’armée française était – je reprends son expression – « au taquet », le lancement de l’opération Sentinelle ayant aggravé cette situation, puisque près de 11 000 militaires sont à présent déployés de manière continue sur le territoire national.

Ce sont 70 000 militaires qui ont été engagés en 2015, certaines unités jusqu’à six fois. Cette situation est exceptionnelle et joue malheureusement sur les temps de repos, mais également sur les temps de préparation opérationnelle de nos militaires, parfois diminués de 60 %. Néanmoins, nous saluons ici leur professionnalisme et leur dévouement.

Des questions se posent, en particulier en ce qui concerne l’état catastrophique, voire indigne et scandaleux de certains hébergements, notamment en région parisienne.

Si la rusticité est une caractéristique de nos forces armées et se conçoit en opérations extérieures, comme j’ai personnellement pu en être témoin l’été dernier au nord du Niger près de la passe de Salvador, une telle situation est inacceptable en ce qui concerne des effectifs déployés sur le territoire national.

En effet, 85 % des militaires engagés dans l’opération Sentinelle sont hébergés sur des sites appartenant au ministère de la défense dans lesquels des emprises militaires ont été aménagées en urgence pour répondre aux besoins.

Toutefois, un an après le lancement de l’opération, comme le souligne le secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale Louis Gautier, « ce qui a été conçu et accepté dans l’urgence après les attentats de janvier 2015 ne doit pas devenir la norme ».

Nous déplorons que les militaires subissent des modes de vie très dégradés par rapport à ceux que connaissent les policiers, les CRS ou les gendarmes mobiles déployés dans des conditions comparables. Aucun fonctionnaire de l’administration civile ne tolérerait de telles conditions d’hébergement et de travail.

Par ailleurs, nous soutenons la volonté du Gouvernement d’accroître le rôle de la réserve, comme nous l’avions demandé ici même à de multiples reprises. Cette initiative est essentielle, mais nous devons aujourd’hui aller plus loin.

Sans vouloir ressusciter la Défense opérationnelle du territoire rendue caduque par la suspension de la conscription, il est nécessaire que notre pays se dote d’une véritable garde nationale, dont l’ossature devrait s’appuyer sur les 28 000 réservistes actuels et les 40 000 annoncés d’ici 2019, pour lesquels l’augmentation des moyens – que vous nous avez promise, monsieur le ministre – est particulièrement bienvenue et attendue de longue date.

Le plus rapidement possible, cette garde nationale devrait prendre le relais des effectifs classiques de nos armées engagées dans les opérations Vigipirate et Sentinelle afin d’alléger les tensions pesant sur nos armées. Elle pourrait également être utile, par exemple, dans le domaine de la cybersécurité, en donnant un cadre juridique à de jeunes Français connectés qui veulent servir leur pays, comme pour des appuis ponctuels au service de santé des armées.

Cette garde nationale ne doit cependant pas être un corps inspiré de l’histoire ou d’expériences étrangères, mais un modèle issu de nos propres pratiques, de notre « ADN sécuritaire ».

Elle devra notamment se constituer autour de la réserve de la gendarmerie nationale, à la militarité réaffirmée, eu égard à sa cohérence opérationnelle et territoriale, à sa forte et longue tradition et à sa mise en application sur le terrain du continuum sécurité-défense.

Mes chers collègues, alors que le monde dans lequel nous vivons est chaque jour plus instable et dangereux, nous devons non seulement donner des moyens supplémentaires à notre défense, mais également susciter une prise de conscience collective.

Des dizaines de milliers de citoyens civils acceptant de consacrer du temps au service de la France et de la sécurité de tous, voilà ce qui reste la meilleure des réponses à toutes celles et à tous ceux qui veulent nous terroriser !

Philippe FOLLIOT intervient dans le débat relatif à l’emploi des forces armées