Philippe FOLLIOT participe au débat sur la politique maritime de la France

carteLe mercredi 14 janvier, Philippe FOLLIOT s’exprimait sur la politique maritime de la France dans l’hémicycle de l’Assemblée Nationale. Débat demandé par le groupe UDI, ces discussions ont permis aux députés d’échanger avec le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche. Le député de la 1ere circonscription du Tarn a identifié les trois points que la France doit, selon lui, gérer dans son rapport à la mer : un défi alimentaire, un intérêt énergétique et un enjeu d’accès à l’eau. Aussi, il a affirmé, comme il le fait depuis des années, que le destin de notre pays était maritime et ultramarin plus que terrestre et métropolitain. Cependant, celui-ci s’inquiète que le domaine maritime français soit un atout malmené.

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Monsieur Philippe FOLLIOT. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la mer, magnifiée par nombre d’artistes et d’écrivains, a toujours fasciné. Si le groupe UDI a souhaité que ce débat ait lieu, c’est parce que cet enjeu est essentiel pour l’avenir, non seulement de notre pays, mais aussi de l’humanité tout entière. L’humanité ne pourra relever trois des principaux défis qu’elle aura à affronter au XXIe siècle que par une exploitation raisonnable et raisonnée des ressources des mers et des océans.

Il s’agit tout d’abord du défi de l’alimentation. Notre planète compte sept milliards d’êtres humains ; à l’horizon 2050, nous serons peut-être neuf, dix ou onze milliards, voire plus ! Nous le savons tous, la superficie des terres cultivables est par définition limitée : pour nourrir la population mondiale, il faudra donc rechercher une certaine quantité de ressources alimentaires – notamment des protéines – dans les mers et les océans. Sous ce rapport, nous en sommes encore à la préhistoire. Comme mode de subsistance en effet, la pêche telle qu’elle se pratique aujourd’hui, c’est la cueillette des ressources marines. L’humanité devra donc relever le défi d’une exploitation raisonnable et raisonnée de ces ressources. Je pense bien sûr à l’aquaculture, mais aussi à l’intensification de l’exploitation d’espèces naturelles telles que les algues : la France consomme 17 tonnes d’algues par an, contre plus de 2 000 tonnes en Chine ! De nombreuses possibilités s’offrent à nous pour développer l’exploitation des ressources des mers. Chacun doit être conscient, par exemple, que la pharmacopée de l’avenir se trouve dans les mers et les océans, qui renferment 90 % des espèces inconnues, notamment les zooplanctons et les phytoplanctons.

L’opération Tara, menée grâce à des mécènes français, est exemplaire à cet égard, en ce qu’elle révèle combien notre connaissance des grandes profondeurs est limitée. Certains chiffres laissent rêveurs : 400 hommes ont gravi le toit du monde, l’Everest ; plusieurs dizaines sont allés dans l’espace ; douze ont marché sur la Lune ; seuls deux sont descendus jusqu’au point le plus profond des océans, dans la fosse des Mariannes, 11 000 mètres au-dessous du niveau de la mer. Au temps des grandes découvertes, on parlait de terra incognita. Aujourd’hui, c’est de mare incognitum qu’il faudrait parler : excepté l’espace, le grand domaine qu’il nous reste à explorer, ce sont les mers et les océans. C’est un enjeu majeur, au même titre que l’énergie.

L’énergie représente en effet un deuxième défi pour l’humanité. La mer est un gisement exceptionnel, voire inépuisable, d’énergies renouvelables. Relever ce défi impose de prendre la mesure de certaines réalités. Aujourd’hui, plus de la moitié du pétrole utilisé dans le monde provient de sources offshores sans parler des ressources minières, avec les nodules polymétalliques.

L’accès à l’eau est le troisième enjeu fondamental pour l’humanité. Il faut savoir que 41 des 70 métropoles de plus d’un million d’habitants situées sur le littoral souffrent de problèmes d’accès à l’eau. A cet égard, la désalinisation de l’eau de mer sera essentielle pour garantir à l’humanité l’accès à cette ressource.

Le grand paradoxe, monsieur le secrétaire d’État, c’est que notre pays croit être une puissance européenne et continentale alors qu’il est en réalité une puissance mondiale et maritime. La France souffre d’un mal particulièrement profond : le « métropolicentrisme », qui est une forme de négation de l’outre-mer, soit une négation de la réalité même de notre pays, dont le domaine maritime s’étend sur 12 millions de kilomètres carrés – ce qui en fait le deuxième au monde, derrière le domaine maritime des États-Unis. Notre zone économique exclusive s’étend sur les trois océans et nous sommes présents sur quatre des cinq continents. J’ai coutume de dire que si l’on additionne les zones terrestres et maritimes sur lesquelles s’exerce la souveraineté française, notre pays est plus étendu que la Chine ! Il faut prendre conscience de cet atout majeur pour l’avenir. Ce qui nous manque, c’est une grande politique visant à valoriser nos atouts. Certes, la France a des points forts, et vous les avez rappelés, monsieur le secrétaire d’État. On sait qu’aujourd’hui l’économie maritime pèse plus que la production automobile en France, et pourtant ces sujets ne feront jamais l’ouverture du journal de vingt heures.

Il faut avoir conscience qu’une vraie politique maritime nécessite des objectifs et des investissements de long terme. Il y a certes des enjeux spécifiques, qu’il s’agisse du développement de l’hinterland – Jean-Christophe Fromantin développera ce point tout à l’heure –ou de l’outre-mer, sur lequel Philippe Gomes reviendra. Mais ce qui manque à notre pays, c’est une stratégie inspirée par un souffle gaullien ! Ce qui manque à notre pays, c’est  l’esprit qui a inspiré les grands programmes de l’époque gaullienne, qu’il s’agisse du nucléaire, des  grandes infrastructures routières et ferroviaires, de l’aéronautique ou de l’aérospatiale.

Nous devons aussi prendre conscience de la nécessité de protéger notre domaine maritime. Ce qui est en train de se préparer à travers l’accord de cogestion de l’îlot de Tromelin constitue un terrible précédent ! ce sont 240 000 kilomètres carrés de zone économique exclusive qui sont en jeu, à comparer aux 345 000 kilomètres carrés de zone économique exclusive de la métropole. Voilà ce que nous risquons de perdre, outre que cela ne manquera pas, par effet domino, d’avoir des conséquences sur d’autres de nos possessions ultramarines. Un pays qui doute de lui-même est incapable de défendre sa souveraineté. Pour mesurer combien la France doute d’elle-même, il n’est qu’à voir avec quelle arrogance la puissance chinoise revendique en mer de Chine des îlots qui ne lui appartiennent pas, alors que notre pays abandonne l’îlot de Clipperton à son sort, c’est-à-dire à tout le monde, aux trafics les plus divers, alors que ses alentours comportent des ressources de thonidés exceptionnelles. Clipperton nous permettrait par ailleurs d’être présents dans le Pacifique Nord, où l’on dit que l’avenir du monde se jouera. Alors que nous avons des possessions dans cette région, nous sommes incapables de les utiliser, de les valoriser, d’y défendre notre souveraineté : il y a là de quoi s’interroger. Nous devons savoir inscrire nos projets dans une perspective longue, qui dépasse l’action au jour le jour. Une politique maritime suppose également de donner à notre marine nationale la capacité de défendre notre souveraineté maritime. Au lieu de cela, on prétexte le manque de moyens pour s’y refuser. Aucun autre pays au monde n’agirait comme nous ! J’espère que ce cri du cœur qui est le mien suscitera une prise de conscience collective de tout ce qui se joue là. J’espère que ce débat nous permettra de réfléchir aux moyens d’assurer cette souveraineté de la meilleure façon possible, mais aussi d’ouvrir de véritables perspectives de nos outre-mer, afin d’en faire de véritables zones de développement de notre économie maritime. Pour l’heure, qu’il s’agisse de nos départements et collectivités d’outre-mer ou de la métropole, le mot d’Éric Tabarly, selon lequel « la mer, pour les Français, c’est ce qu’ils ont dans le dos quand ils regardent la plage » se vérifient encore trop souvent. Il faut que l’avenir infirme ce propos, tant en métropole que dans nos outre-mer.

Paul Claudel affirmait dès 1911 que la mer était la vie du futur. Je suis intimement convaincu que la France sur mer sera la France du futur.

Philippe FOLLIOT participe au débat sur la politique maritime de la France