De l’eau dans… le gaz de schiste !

Edito lettre d’information n°94 du 14 mai 2011

Il y a des moments où les politiques marchent… sur la tête. A force de vouloir être dans le registre émotionnel et de tenter de répondre dans la précipitation aux pulsions de l’opinion ou de quelques agitateurs, on en arrive à faire n’importe quoi.

Ce mardi, je me suis exprimé en séance pour expliquer pourquoi le lendemain je voterai contre le texte sur l’exploration et l’exploitation des huiles et gaz de schiste.

Il y a six mois, personne ne parlait de ce problème et il a suffi, pour le mettre à la une, que certains dénoncent légitimement le manque de transparence sur des autorisations d’exploration, sans parler de la diffusion d’un reportage à la télévision sur de scandaleuses pratiques d’exploitation, sans contrôle aux Etats-Unis. Vous ajoutez à cela « l’agit prop » d’un moustachu du Larzac, une dose de populisme et le manque de courage de la classe politique et vous voyez le résultat.

Sur le fond, je ne suis pas un fan, loin s’en faut, de ce type d’exploitation. En cohérence avec mes positions passées, je crois que la meilleure et moins chère des énergies est celle qu’on ne gaspillera pas inutilement et qu’on économisera. Pour moi, il faut, bien entendu, mettre l’accent sur les énergies renouvelables (marines notamment), mais aussi être réaliste en maintenant le nucléaire et en sécurisant nos sources d’approvisionnement en énergies fossiles.

Sur la forme je suis scandalisé par le fait que, suite à un affichage politicien venant tant de l’UMP que du PS, le Parlement vote en urgence une loi alors que la mission d’information parlementaire sur cette question, co-présidée par mes collègues F-M Gonnot (UMP) et Ph. Martin (PS), n’a pas encore rendu ses conclusions.

Comme le résident de l’Assemblée B. Accoyer, je pense que c’est un dangereux précédent que de mépriser le travail de fond de députés qui, en l’occurrence, doivent rendre leur rapport dans… un mois ; d’autant plus que la constitution dit qu’il faut, autant que possible, mener des études préalables d’impact avant le vote d’une loi !

La sagesse c’est d’aller au fond du problème, de voir les aspects négatifs ou positifs de cette exploitation de gaz de schiste, de confronter les conclusions du travail parlementaire avec celui de la mission d’inspection des ministères de l’écologie et de l’industrie avant de décider et de voter une loi.

De plus à ce jour, nul ne sait précisément s’il y a oui ou non des huiles et gaz de schiste dans le sous-sol de notre pays et si, techniquement, économiquement, écologiquement, il est acceptable et rentable de les exploiter.

En fait c’est comme si un médecin opérait un patient avant d’être allé au bout du diagnostic et avoir fait toutes les analyses : sang, scanner, IRM, etc… On dirait alors de lui qu’il est irresponsable !

Cela est d’autant plus problématique qu’avec le vote mal ficelé de cette loi nous risquons d’aller vers un fiasco juridique avec censure par le Conseil Constitutionnel après saisine dans le cadre d’une Q.P.C. (Question Prioritaire de Constitutionnalité).

Ma liberté et mon honneur de parlementaire, comme pour quelques rares autres collègues, font que je m’indigne contre de telles pratiques.

 

Amitiés.

Philippe Folliot.

De l’eau dans… le gaz de schiste !