Philippe Folliot et Xavier Louy réagissent au non-événement du Comité interministériel de la Mer

QuanFrance-sur-merd nos grands océans font des petites rivières!

On l’attendait ce Comité Interministériel de la Mer !

Le Président Sarkozy nous avait mis l’eau à la bouche au Havre au mois de juillet. Même si la presse nationale n’avait retenu que l’annonce de la ligne TGV Paris-Le Havre, Nicolas Sarkozy avait été solennel: « Je suis venu aujourd’hui au Havre réparer un oubli historique, l’oubli trop long qu’a fait la France de sa vocation maritime. »

La séquence était solidement charpentée: Grenelle de la Mer ; discours de clôture et orientations du Président en juillet ; Livre bleu sur la politique maritime française en novembre et enfin Comité interministériel de la Mer (CIMer) en décembre pour valider les nouvelles orientations. Tous les éléments étaient réunis pour une réforme en profondeur de notre politique maritime, pour une prise de conscience historique de notre dimension maritime.

Las! Après ce CIMer, François Fillon a quelque peu noyé ces espérances.

Passé le constat sur notre espace maritime, le deuxième du monde, qui positionne la France sur 4 continents, 3 océans et 4 mers, les annonces tant attendues sont tombées à l’eau.

Quelle vision géopolitique pour la France maritime? Que ce soit en terme d’ambition internationale ou tout simplement au niveau des responsabilités régionales spécifiques qui nous incombent en tant que riverains de l’Océan Indien, du Pacifique ou de l’Atlantique, la France n’a aucun objectif, aucun plan stratégique particulier, aucun partenariat privilégié. Notre plus grand voisin maritime, l’Australie, qui veut devenir le leader mondial de la gestion des océans, a beaucoup à nous apprendre et il serait pertinent qu’en tant qu’Etat-nation présent dans l’hémisphère Sud nous engagions avec elle des coopérations approfondies sur les enjeux océaniques mais aussi sur l’avenir de l’antarctique. Nous devons aussi reprendre la main face au géant canadien, voisin de Saint-Pierre-et-Miquelon, sur le dossier de l’extension du Plateau continental de l’Archipel.

Quels moyens pour notre recherche océanographique? Alors que nous avons avec l’IFREMER la meilleure recherche marine du monde, une véritable NASA des océans, les moyens qui y sont investis restent relativement faibles par rapport aux enjeux de cette excellence: 200 millions d’euros à comparer avec les 3,5 milliards d’euros du Commissariat à l’énergie atomique par exemple. Puisque l’Etat a décidé d’investir dans la R&D du futur, il serait opportun que l’IFREMER entre dans le champ du grand emprunt et que les partenariats avec le privé se développent pour gagner les compétitions technologiques de demain.

Quelle marine nationale pour protéger le deuxième espace maritime mondial? Tandis que la Jeanne d’Arc partait de Brest pour sa dernière mission, saluée comme il se doit par les plus hauts responsables de l’Etat, la question des moyens de la marine nationale et par conséquent d’une grande partie de l’Action de l’Etat en Mer reste très floue. Nous avons dit et écrit que la marine nationale avait été la grande oubliée dans la Loi de programmation militaire 2009-2014.

Quelle gouvernance pour la politique maritime? Enfin la déception est à son comble sur le segment institutionnel. Nous appelions de nos voeux la création d’un Grand Ministère de la Mer et de l’Outre-mer tant pour nous les deux dimensions sont intimement liées ; le Premier Ministre a annoncé l’extension du Conseil national du littoral à la Mer. Nous voulions une loi d’orientation sur la politique maritime française qui aurait rivalisé avec nos concurrents australien, japonais, canadien, américain ; nous avons trois malheureux articles sur la protection du littoral et du milieu marin dans le Grenelle 2…

Il faut rendre justice cependant au gouvernement sur au moins deux points: la pêche où les efforts de Bruno Le Maire sont considérables pour éviter une politique européenne catastrophique et la politique portuaire où les autorités françaises ont pris conscience du retard intolérable de nos ports dans la compétition européenne.

Mais globalement, la France aura raté une nouvelle fois l’occasion historique de jeter l’ancre et de mettre le cap d’ici 2058 sur le haut du podium des nations maritimes! Notre « France-sur-Mer », un empire sacrifié…

Philippe Folliot, député du Tarn et Xavier Louy, PDG de XLCo.., auteurs de France-sur-Mer, un empire oublié (Editions du Rocher, octobre 2009)

 

 

Philippe Folliot et Xavier Louy réagissent au non-événement du Comité interministériel de la Mer