49.3

| 2 MAR. 2020 | 

49.3, ce n’est pas le résultat d’un match de rugby, mais l’article 49 alinéa 3 de la Constitution en vertu duquel un texte est adopté sans vote par le Parlement. Cette « bombe atomique » institutionnelle, certains anciens premiers ministres en ont usé (8 fois pour Edith CRESSON et Jacques CHIRAC, 6 fois pour Manuel VALLS, 2 fois pour Jean-Pierre RAFFARIN et Alain JUPPE…) et d’autres, comme Michel ROCARD entre 1988 et 1991, abusé (28 fois).

Je ne vais pas revenir sur ce que tout le monde sait avec une obstruction sans précédent des groupes communistes et insoumis qui, au rythme d’étude du texte, aurait au moins mobilisé trois mois de débat parlementaire.

Face à cette situation, Richard FERRAND, Président de l’Assemblée nationale, avait proposé aux groupes politiques un temps programmé de 120 heures réservées à la discussion de ce projet de loi. La France Insoumise et les communistes ont refusé cette « main tendue » et se sont ainsi employés à ralentir les débats. Ils ne s’en sont pas cachés. Jean-Luc MELENCHON, Président du Groupe La France Insoumise à l’Assemblée nationale, assumait ainsi « le fait de faire de l’obstruction dans l’hémicycle » dès le 29 janvier dernier.

Ainsi, sur les plus de 40 000 amendements déposés (sans compter les sous-amendements), 56% étaient issus des députés « insoumis » et 32% des députés communistes alors même qu’ils composent moins de 10% de la représentation nationale. Pendant 2 semaines, et plus de 117 heures de débat (soit plus que les deux dernières réformes des retraites réunies avec 45 heures en 2014 et 65 heures en 2010), les députés n’ont pu discuter que de 6 articles sur les 65 du texte. Samedi après-midi, avant l’intervention du Premier ministre, il manquait 600 heures de débat pour achever la discussion du projet de loi.

Il est vrai que débattre pendant des heures et des heures de sémantique est caricatural et ne fait pas forcément avancer le débat. A ce titre, notre Assemblée a discuté pendant près de 3 heures d’amendements et de sous amendements identiques qui proposaient de remplacer « chaque année » par « annuellement » ou encore « réduction » par « diminution ». Lors des précédentes législatures, j’avais participé à la discussion de projets de loi où majorité et opposition s’affrontaient sur d’importants sujets, pourtant la forme n’avait jamais autant pris le pas sur le fond que lors de la discussion de ce texte sur la retraite universelle et par points.

En démocratie, tout le monde a le droit de s’exprimer mais on ne peut pas, à travers un usage détourné de la procédure, priver les députés mais aussi les françaises et les français d’un légitime débat de fond.

Samedi après-midi, le Premier ministre a donc pris ses responsabilités et a enclenché l’article 49 alinéa 3 de notre Constitution. Il ne l’a pas fait pour s’affranchir de sa majorité, elle le soutient. Il ne l’a pas fait pour museler l’opposition, le temps laissé au débat nous montre le contraire. Il l’a fait car, en l’état, la situation n’était plus tenable et que tous, collectivement, nous devions avancer ! La Constitution lui donnait l’opportunité de le faire.

La Constitution, toute la Constitution, rien que la Constitution. La confiscation du débat, ce sont bien les opposants qui s’y sont adonnés.

49.3